Résidences de service et crise sanitaire : l’explosion des impayés de loyers
Les résidences de services semblent à première vue être de très bons investissements, peu risqués et à la rentabilité maximale. Or, en y regardant de plus près, on s’aperçoit que des risques existent, et ces derniers se sont amplifiés avec la crise du Covid-19.
Bien loué - mars 2021
De plus en plus de particuliers investissent dans des résidences de services : résidences de vacances, résidences séniors, résidences étudiantes.
Toutefois, malgré les avantages présentés, ces investissements ne sont pas sans risque, qui plus est en période de crise sanitaire.
Quels sont les avantages d’un investissement dans une résidence de service ?
En effet, l’immobilier étant une valeur refuge, certains ont décidé d’acquérir un appartement ou une chambre meublée dans une résidence de services, ces résidences qui sont confiées via un bail commercial à un gestionnaire professionnel.
En effet, en théorie, ce type d’investissement ne présenterait que des avantages. Il n’existe pas de problème de gestion, les revenus sont définis à l’avance, et surtout ce type d’investissement s’avère fiscalement très avantageux (récupération de la TVA, imposition dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et donc possibilité de déduire de ses loyers l’intégralités des charges, et dans certains cas même une réduction de 11% d’impôt sur le revenu).
Quels sont les inconvénients d’un investissement dans une résidence de service ?
Toutefois, les loyers ne sont pas garantis, et en temps de crise, comme en ce moment avec la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19, les propriétaires qui ont fait le pari de la résidence meublée sont gravement touchés.
En effet, dès le premier confinement de mars 2020, les lieux touristiques n’ont plus accueillis de touristes, et les fermetures administratives ont été prononcées.
D’ailleurs, selon le syndicat national des résidences de tourisme, ces dernières accusent une baisse de 30% de leur chiffre d’affaires en 2020.
Par ailleurs, malgré le fait que les résidences pour les étudiants soient restées ouvertes, les universités s’étant vidées de leurs étudiants les résidences étaient par la même occasion quasiment vidées de leurs occupants.
C’est ainsi que, beaucoup de sociétés exploitantes ont cessé de verser les loyers, alors même que les investisseurs doivent pour certains continuer à rembourser leurs emprunts.
Certain gestionnaires locataires ont repris les versements de loyers durant l’été, mais tous les propriétaires n’ont pas eu cette chance, et certain n’ont reçu aucun paiement depuis un an !
Ces gestionnaires invoquent alors souvent un cas de force majeure (en faisant référence à la pandémie) afin de faire valoir leur exception d’inexécution. Certains vont même jusqu’à saisir les tribunaux commerce afin de faire ouvrir une procédure de conciliation, cette procédure ayant pour particularité de suspendre toute poursuite en recouvrement de dettes (et donc de loyers) jusqu’à la fin des négociations. D’ailleurs, la société Piere&Vacances y a recouru fin janvier 2021, tandis que AppartCity y a recouru dès l’été 2020.
Certains investisseurs ayant contracté des crédits et n’étant pas capables de rembourser leurs échéances de prêts, se voient parfois même menacés de surendettement, sont alors contraints de signer les arrangements proposés afin d’espérer obtenir une partie du loyer leur permettant de rembourser leurs propres dettes. Ces derniers acceptent alors le plus souvent l’arrangement amiable proposé par ces sociétés, se matérialisant souvent par une baisse des échéances à venir.
Quelles actions en justice sont possibles en cas d’impayés de loyers ?
Toutefois, certains propriétaires ont réclamé le paiement de leurs loyers en justice.
En effet, plusieurs milliers d’investisseurs ont décidé d’enclencher des procédures contre les gestionnaires de résidences de services, et réclament ainsi le paiement des loyers non perçus pendant les périodes de confinement. Ils se sont pour la plupart rassemblés en association de copropriétaires pour mener des actions ensemble.
C’est ainsi que, dans un arrêt du 5 novembre 2020, la Cour d’appel de Grenoble a balayé l’ensemble des arguments tenant à la force majeure ou à l’exception d’inexécution invoqués par une société de gestion, et a fait droit à la demande de paiement des loyers du propriétaires bailleurs, auxquels s’ajoutent le paiement de dommages et intérêts.
En effet, la Cour d’appel considère que l’exception d’inexécution ne peut être invoquée par le gestionnaire car « le bail commercial n’a pas subordonné le paiement des loyers à une occupation particulière des locaux ni à un taux de remplissage ». Ainsi, le propriétaire bailleur n’a donc pas manqué à ses obligations contractuelles, malgré le fait que la location soit rendue impossible.
De plus, l’argument tenant à la force majeure est lui aussi écarté, puisqu’en l’espère l’exploitant ne démontre pas des difficultés de trésorerie qui aurait rendu impossible le paiement des loyers.
De même, très récemment, 740 propriétaires se sont regroupés en association pour assigner devant le Tribunal Judiciaire de Paris la société Pierre et Vacances Center Parcs pour non-paiement des loyers durant le premier confinement. Cela représente 2,2 millions d’euros, soit environ 2000 à 3500 par propriétaire. Le recours inclura bientôt les loyers non versés durant le deuxième confinement, ce qui pourrait doubler les sommes réclamées.
Selon l’avocat des copropriétaires, ils pourraient concéder un échelonnement des paiements, mais ils n’abandonneront pas leurs loyers.
Une action similaire devrait être introduite prochainement par une centaine de copropriétaires de logements contre la société Villages Nature Tourisme.
Ainsi, en plus des tentatives de résolutions amiables des litiges concernant le non paiement des loyers par les gestionnaires de résidences de services durant cette crise sanitaire sans précédent, de nombreuses actions judiciaires ont été introduites par des propriétaires souhaitant se faire payer l’ensemble des loyers non versés en raison du confinement.
Au vu de la situation sanitaire actuelle, ce type d’action devrait se généraliser, les propriétaires étant parfois surendettés, ils ne parviennent alors plus à rembourser leurs échéances de prêts.
Les tribunaux semblent se positionner en faveur des propriétaires, et semblent généralement écarter l’argumentation des gestionnaires qui invoquent la force majeure et l’exception d’inexécution.
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